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GILBERT PÉMENDRANT, LE V.I.P. DU P.I.P.
(Very Important Périgourdin du Pôle International de la Préhistoire)

Il salue avec un sourire qui cache ses larmes, beau comme à l'arrivée du Tour de France. C'est Gilbert Pémendrant, 75 ans, paysan propriétaire de la grotte ornée de Bernifal, face au public venu l'acclamer. Le bel auditorium tout neuf du Centre d'Accueil de la Préhistoire aux Eyzies est archibondé. Lézamidal, cinq musiciens du groupe folk d'Alles-sur-Dordogne, ont accueilli la foule au son de la flûte, de la cabrette (petite chèvre) et du tambourin. On est bien en Pays d'Oc, embarqué dans ce vaisseau ultra moderne où, comme on nous l'avait promis, la préhistoire est en vie. Pour preuve cette avant-première du film documentaire : LE DERNIER PAYSAN PRÉHISTORIEN produit par Ferrassie TV. Un portrait de l'homme, droit dans ses bottes, droit dans sa grotte. Un film qui passe du dessus au dessous. Des veaux sous la mère aux bauges d'ours des cavernes et retour : des bisons gravés à l'Âge du renne aux oiseaux domestiqués et descendus des arbres qu'on appelle du coup « basse-cour ».
Oui, à l'origine, le coq français est un faisan sauvage d'Asie : le coq Bankiva qui volait et qui nichait dans les arbres, enfin, surtout les femelles. Mais voilà, pour les volailles comme pour les hommes, les temps changent à une vitesse folle. Et de ce temps si proche où la terre, la vigne, les châtaignes, les cèpes, l'oseille, les scorsonères et les pissenlits nourrissaient les gens ici, il reste en 2011, par un étrange décalage temporel, un glissement dans le temps, Gilbert Pémendrant. Ce dimanche où il aura occupé le devant de la scène restera dans nos mémoires comme un rêve surgi du passé. Avec lui, le temps s'est arrêté, la joie, l'émotion nous ont envahis, parfois même, submergés. Laissons Jean Bonnefon, journaliste de renom et troubadour fringant, nous raconter ce qui s'est vraiment passé ce fameux dimanche 3 avril au P.I.P., à l'occasion de la projection en avant-première mondiale du film de Sophie Cattoire : LE DERNIER PAYSAN PRÉHISTORIEN.



LE DERNIER PAYSAN PRÉHISTORIEN
Un homme… Un film

par Jean Bonnefon

Le dernier paysan préhistorien, c’est lui : Gilbert Pémendrant. En ce dimanche 3 avril il a mis ses habits… du dimanche, justement. Un peu intimidé, un peu maladroit. Près de lui Sophie Cattoire veille à tout. Elle le couve gentiment… Parce que c’est à cause d’elle tout ce remue-ménage. Gilbert n’en revient pas. Tout ce monde est là pour lui. Ou plutôt pour le film qui a été fait sur lui, par Sophie. Lui, est intimidé et elle, rassurée. Patiemment elle a filmé Gilbert dans sa ferme à La Fuste dans la vallée des Beunes en Périgord Noir et aussi – et surtout – dans sa grotte de Bernifal. Parce que Gilbert est paysan et aussi préhistorien. Préhistorien amateur au sens le plus amoureux du terme… Et aujourd’hui c’est leur rencontre qui est projetée sur l’écran du Pôle International de la Préhistoire… Alors c’est normal que Gilbert soit intimidé et que Sophie soit rassurée : la salle est pleine. On a refusé du monde au point qu’une projection supplémentaire est prévue le 24 avril. C’est une assemblée hétéroclite qui se presse dans ce vaisseau de béton, de verre et d’acier, bâtiment éminemment contemporain parfaitement intégré au site archi millénaire des Eyzies. Il y a des Périgourdins de toutes sortes : des paysans, des scientifiques, des vieux, des jeunes, des enfants, des artistes, des mères de familles, des parents et leurs jeunes enfants, des papis endimanchés comme Gilbert, des jeunes filles branchées : le Périgord dans sa diversité. Le silence se fait…

La caméra de Sophie Cattoire est subjective. Elle marche dans la cour de la ferme, près des poules, des chiens… Elle est sur le tracteur que Gilbert va ranger contre un abri sous roche où sans doute depuis la préhistoire, des générations de paysans avant lui ont rangé leurs outils. Le temps n’a rien changé à l’instinct de ces hommes là. Et puis Gilbert monte à sa grotte, comme il irait faire un tour à la cave pour y dénicher une bonne bouteille. Mais attention : le millésime est somptueux ! Voilà que sur l’écran, les mammouths, bisons, bouquetins et autres animaux venus du fond des temps viennent à la rencontre de Gilbert Pémendrant, le berger de Bernifal. Visite guidée par une voix familière… Il a le même accent que ceux de la salle… Il est des leurs. Nous sommes tous passés sur la route en contrebas. Combien d’entre nous sont entrés dans cette cavité ? Alors aujourd’hui, on a le sentiment d’être des invités privilégiés. Privilégiés parce que Sophie Cattoire réussit à nous emmener dans l’intimité de son sujet. Elle nous entraine sans voyeurisme au plus près de la vie de Gilbert. On sent, dans le dialogue qu’elle établit avec lui, l’affection qu’elle lui porte. Alors Gilbert est en confiance et il raconte… Il raconte son amour pour la grotte, sa passion pour la préhistoire… Il dit sa fierté d’être le gardien de ce temple là. On le sent heureux d’accueillir Norbert Aujoulat, préhistorien reconnu, qui tous les ans amène ses étudiants de Bordeaux à la rencontre de Gilbert et de sa grotte. Il dit aussi ses doutes sur cette société qui règlemente tout à outrance et qui se moque de savoir si au fond du Périgord un paysan préhistorien de soixante seize ans doit encore travailler pour arriver à vivre modestement sur sa propriété. Le film est sensible… On se sent au plus près du silence de Bernifal. On sent presque l’odeur de la soupe que Gilbert a préparée pour recevoir Sophie. On a envie d’humer l’odeur des foins et des vaches de la ferme. Une mazurka traditionnelle accompagne le tout. On est bien au cœur de ce Périgord là.

Puis la lumière se rallume… Gilbert et Sophie sont longuement – très longuement – applaudis. On sait désormais que dans ce monde de bruit et de fureur, quelque part dans la vallée des Beunes, existe un lieu authentique et préservé, sur lequel veille un homme simple et droit. Gilbert Pémendrant est bien le dernier paysan préhistorien.

Que Sophie Cattoire soit remerciée pour nous l’avoir fait rencontrer.

Jean Bonnefon

Photos : Vincent Lesbros & Jacques Saraben.

Au sujet de ce film documentaire, lire aussi la chronique de Jacques Saraben, peintre et photographe intitulée : On ne voit bien qu’avec le cœur

 

version française version occitane version anglaise Translation into English : Valérie Saraben Revirada en occitan : Joan-Claudi Dugros
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