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LA GROTTE MYKOLAS :
TOMBEAU MILLÉNAIRE EMPLI DE SECRETS

Encore chasseurs, mais déjà principalement agriculteurs, qu’est-ce que nos ancêtres du Néolithique Moyen emportaient dans la tombe ? Quels étaient leurs rites funéraires, révélateurs de leur rapport à la vie ? Grâce au programme de fouilles engagé par Antoine Chancerel, néolithicien, c’est-à-dire généraliste de la culture immatérielle de cette époque, et Patrice Courtaud, anthropologue, le voile devrait être en partie levé sur ces questions. Les données collectées nous permettront peut-être de moins occulter, en Périgord où le Paléolithique est roi, cette période de notre histoire oubliée des manuels scolaires et de ce fait très mal connue. L’intérêt de fouiller ce site, précisément, provient du fait que les premières datations de fragments d’os et de poteries effectuées le situe il y a environ 5000 ans, au Néolithique Moyen, période où très peu de grottes sépulcrales ont pu jusqu'alors être découvertes et fouillées. Cette cavité recèle donc vraisemblablement un chapitre de notre histoire régionale à ce jour largement incomplet.



LA DÉCOUVERTE GRÂCE AUX BLAIREAUX

En novembre 2005, deux membres du G3S – groupe spéléologique, scientifique et sportif de Périgueux – Eric Castang et Jean-Michel Degeix, accompagnés du fils de ce dernier, Mykolas, alors âgé de trois ans, ont fait la découverte archéologique dont ils rêvaient. Intrigués par le courant d’air s’échappant d’un trou de blaireau, à flanc de coteau, ils ont creusé et ont réussi à se faufiler par un passage fort étroit dans une très belle galerie profonde de cinquante mètres environ où l’on peut tenir assis, avec un toit bien plat et des parois arrondies. Mais surtout, ils sont tombés nez à nez avec cinq squelettes humains manifestement très anciens.

Aussitôt informés, comme la loi le prescrit, les Services Régionaux de l’Archéologie d’Aquitaine ont dépêché sur place dès le mois suivant des anthropologues et des préhistoriens, afin qu’ils prélèvent des fragments d’os et de poterie pour faire établir des datations au carbone 14.
Résultat : ces corps reposaient là depuis plus de 5000 ans, ce qui nous ramène au Néolithique Moyen, cette période charnière de notre histoire où les populations nomades préhistoriques se sédentarisent pour fonder des villages d'éleveurs et d'agriculteurs.

LA DÉCISION D’ENTAMER UN CHANTIER DE FOUILLES

Spécialiste de cette période, Antoine Chancerel, conservateur au Musée National de Préhistoire des Eyzies-de-Tayac venu sur place prendre la mesure de cette découverte, a aussitôt décidé d’organiser pour l’année suivante une campagne de fouilles aux abords et à l’intérieur de la cavité. Il l’a en effet identifiée comme étant une grotte sépulcrale collective, plus ancienne que celles déjà répertoriées et étudiées, datées pour la plupart du Néolithique final ou de l’Age du Bronze, il y a environ 3000 ans. L’intérêt de ce site tient donc à son âge reculé. Il tient aussi à son emplacement discret, secret, et donc particulièrement bien conservé, qui contraste avec les structures mégalithiques très hautes et visibles de loin où l’on déposait certains défunts dans d’autres régions à la même époque.
Comprendre ces pratiques funéraires et ce qu’elles ont à nous dire sur les croyances et les cultures de ces nouveaux agriculteurs constituent l’intérêt majeur de ces recherches.

LA PRÉCIEUSE PRÉSENCE DE L’ANTHROPOLOGUE

Aux côtés d’Antoine Chancerel, titulaire de ce chantier de fouilles, Patrice Courtaud, anthropologue venu de l’Université de Bordeaux I. Une contribution essentielle pour analyser, in situ, une foule d’informations sur les vestiges humains en place, avant que ceux-ci ne soient emportés pour être étudiés en laboratoire. Avec leur équipe, du 24 au 30 mai 2007, ils ont fait les relevés topographiques et prélevé les ossements mobiles, déjà remaniés entre autre par les blaireaux. Ils ont ensuite creusé deux périmètres de sondage pour essayer de retrouver le niveau archéologique initial où furent disposés les corps mais aussi les parures et offrandes faites aux défunts.

MYKOLAS, LE RETOUR

La suite de ce chantier de fouilles prévu pour 2008 devrait précisément leur permettre de découvrir les objets liés au rite funéraire. Ils savent d’ores et déjà que ces nouveaux agriculteurs valorisaient encore largement la chasse dans la mort. Mais qui étaient-ils, pourquoi déposaient-ils certains de leurs défunts dans ces endroits quasi inaccessibles et comment se faisait la sélection parmi la population ?
Les futures investigations devraient nous permettre de mieux comprendre ces cultures, parentes pauvres de la Préhistoire en Aquitaine, où l’essentiel des fouilles a jusqu’alors été consacré aux sites paléolithiques, nombreux et splendides, il est vrai.

Sophie Cattoire

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