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COMME UNE POUSSIÈRE D'ÉTOILES JETÉE AU FIL DE L'EAU

Trois regards fraternels entremêlés, ceux du peintre écrivain François Augiéras, du poète Paul Placet et de Philippe Pons, photographe plasticien, nous donnent à voir jusqu'au 5 janvier au Pôle international de la Préhistoire des Eyzies une relecture intérieure du paysage, de la vallée de la Vézère au Sarladais, au fil des saisons. Ces images-poèmes expriment « des sentiments et visions extatiques et chamaniques face aux lieux traversés », comme le confie doucement Philippe Pons à la foule amicale qui entoure sa déambulation aux côtés de Paul Placet, au milieu de leurs communes créations. L'instant est apaisé, suspendu, baigné par le soleil qui toujours en ce lieu nous berce dans le couloir des anges imaginé par l'architecte Raphaël Voinchet.



LA PLUS BELLE SÉPULTURE EST LA MÉMOIRE DES VIVANTS

C'est une vie d'intenses brûlures en quête d'absolu et bravant les interdits qui a consumé François Augiéras, mort sur un lit d'hôpital à Périgueux le 13 février 1971, à l'âge de 46 ans. Depuis ce départ prématuré, son ami l'instituteur Paul Placet honore sa mémoire, inlassablement, en organisant des expositions de ses œuvres peintes et en diffusant ses manuscrits. Philippe Pons a récemment et résolument choisi de l'accompagner. Tandis que Paul lui indiquait sur une carte IGN les méandres de l'initiatique voyage accompli en 1953 sur un radeau de peupliers emporté de Montignac à Limeuil par le courant de la Vézère, Philippe a entrepris le même voyage, collant sur les arbres comme des avis à la population des fragments de poésies écrites par Paul, en écho à l'émerveillement partagé autrefois en ces lieux mêmes avec François. Ce marquage du territoire et l'évocation de ces souvenirs font l'objet d'une vidéo-performance diffusée au sein de l'exposition.

L'ÉCRITURE EST UN EXERCICE DE CONVOCATION DES ESPRITS

Pour faire naître ses images-poèmes, Philippe Pons a exploré le thème de la gémellité, François et Paul étant ses gémeaux. Il a traversé à sa manière le miroir, celui des paysages préhistoriques se reflétant dans la rivière, les citadelles de La Madeleine, de la Roque-Saint-Christophe ou le château de Commarque, dédoublant parfois la photographie elle-même, exploitant cet autre effet de miroir pour créer des silhouettes anatomiques, symétriques, anthropomorphes et fantomatiques. « L'écriture est un exercice de convocation des esprits. C'est quelque chose d'autre qui écrit par ma main » écrivait Kafka. Les trois hommes à leur tour sont pris dans le tourbillon de ces vibrations sensorielles qui nous rattachent aux forces invisibles. Les mots sont nus pour décrire cela, il faut aller voir l'exposition et ressentir dans le silence la connexion magique qui s'en dégage.

JE CROIS EN LA SURVIE DE MON ÂME IMMORTELLE

Chemin faisant, donnant vie à cet univers intitulé « Vézère, toison d'or » Philippe Pons et Paul Placet ont, comme en contrebande, respecté, exaucé de François Augiéras les dernières volontés.
« Je crois en la survie de mon âme immortelle. Étant de religion non-chrétienne, je souhaite que mon corps soit brûlé sur une île de la Vézère et mes cendres jetées au fil de l'eau. »
Extrait de testament de François Augiéras, rédigé à Montignac le 20 mai mille neuf cent soixante-dix.*
De fait, cet hommage nourri de paysages culturels car imprégnés de la vie des hommes, cette poussière d'étoiles dispersée par Philippe et Paul prend place au Pôle international de la Préhistoire, vaisseau sur pilotis flottant sur la Beune, qui se jette précisément aux Eyzies dans la grande Vézère. Ce juste retour des choses s'opère dans ce vaisseau du cyberpassé*, lauréat du "Grand Prix de l'Académie internationale d'Architecture", couloir de ces anges précités, revenants surgis de cette Préhistoire qui en Périgord est notre avenir. Et déjà, cette exposition se sent pousser des ailes l'emportant à Panama en Amérique centrale, puis dans une tournée des centres culturels et des Alliances françaises implantés sur le nouveau continent, grâce à Fabrice Placet, le fils de Paul qui vit là-bas et à qui nous laissons ces mots de conclusion auxquels j'adhère pleinement :
« Quand on voyage, la plus belle chose que nous ayons à donner, ce sont nos racines. »

 

Sophie Cattoire

 

Nous remercions Jacques Saraben pour les documents d'archives, les photographies et les portraits de François Augiéras réalisés au pastel dont il est l'auteur, présentés dans la deuxième page d'illustration de cet article.

 

*François Augiéras a été inhumé dans le cimetière de Domme, à pic sur la Dordogne.

VÉZÈRE, TOISON D’OR Philippe PONS & Paul PLACET Du 14 septembre 2013 au 5 janvier 2014
Exposition "Vézère, toison d'or"
au Pôle international de la Préhistoire,
jusqu'au 5 janvier 2014.
L'exposition sera à Cuba pour la semaine de la francophonie en mars 2014.

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